Frédo l'porteur
by Bourvil
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Me v´ là, c´est moi : Fredo l´ porteur.
C´ que j´en vois défiler, des gens,
Du matin au soir dans la gare,
Où s´ qu´on dit qu´ils sont si bizarre :
Des décidés, des hésitants,
Des pressés, des qui prennent leur temps
Tandis qu´ moi, j´ prends leurs valises.
Et dans tous ceux-là qui s´en vont,
On n´en voit jamais un qui dise :
" Hé l´ porteur, peut-être qu´il trouv´rait ça bon
De monter avec nous dans l´ wagon. "
Alors, j´ reste Fredo l´ porteur.
L´aut´ jour, un taxi s´arrete.
Je m´ précipite, c´était mon tour.
Bon. J´ouvre la portière, je rentre la tête
Pour bien voir si y´ avait du lourd
Et puis, v´ là qu´ j´aperçois une fille,
Une fille qu´avait tellement d´ beauté
Que j´en étais paralysé.
Tout en tremblotant sur mes quilles,
Elle me dit avec un sourire :
" Tenez porteur, prenez tout ça. "
Et moi, comme un mannequin en cire,
J´ la r´gardais et puis j´bougeais pas.
J´avais envie d´ lui dire :
" Madame, depuis qu´il m´est permis d´ rêver,
Depuis que je connais le verbe aimer,
Dans le corps, dans le cœur et puis dans l´âme,
C´est toujours à vous qu´ j´ai pensé.
Sûrement que vous étiez l´inconnue,
Celle qu´on arrange à sa façon,
Qui n´ refuse rien, qui s´met toute nue
Et qu´a la peau comme une chanson
Dont chaque refrain dirait " je t´aime "
Et je suis là, devant vos yeux,
Vos grands yeux bleus, si grands, si sombres
Qui trouvent le moyen avec tant d´ombre
De rester autant lumineux,
Qu´il faut convenir qu´ dans le fond des cieux
La nuit a dû crever son voile
Pour que ses plus jolies étoiles
Dégringolent s´installer chez elle "
Mais la fille m´a interrompu : " Hein?
Alors l´ami, qu´est ce que vous faites?
Ça va pas bien, vous êtes perdu? "
J´ lui ai dis " non " en s´couant la tête.
" Bon, alors, " qu´elle a dit, " ça va.
N´attendez pas, prenez tout ça. "
J´ai empoigné les bagages,
Les sacs, les cartons à chapeaux.
J´ me suis tout filé sur le dos
Et suis parti dans son sillage,
Vers le wagon capitonné,
Où s´ que j´ l´ai doucement installée
Pour qu´elle soit bien pendant l´ voyage.
Quand elle m´a tendu du pognon,
Sûr´ment qu´elle n´a pas du comprendre
Pourquoi qu´ subitement j´ai dit " non "
Et qu´ je m´ suis dépêché de descendre.
De là, j´ suis parti au bistrot,
J´ai bu un coup, deux coups, trois coups,
J´ai bu jusqu´à temps que j´ sois saoul.
Puis j´ai expliqué aux poteaux
Les beaux yeux et les ch´veux de ma blonde.
Quand j´ai eu fini d´ raconter,
Si vous aviez vu à la ronde
Comment ils ont tous rigolé.
Moi, j´ai rigolé avec eux, hein.
Entre hommes, y fallait ça, c´était mieux.
Mais, c´ que ça m´ faisait mal de rire,
Surtout que j´ pouvais pas leur dire
Que d´un coups, je m´ sentais tout vieux
Parc´que moi, Fredo l´ porteur,
Je v´ nais de faire la plus grande bêtise
En ayant porté la valise
Qui pour toujours emm´nait mon cœur.
C´ que j´en vois défiler, des gens,
Du matin au soir dans la gare,
Où s´ qu´on dit qu´ils sont si bizarre :
Des décidés, des hésitants,
Des pressés, des qui prennent leur temps
Tandis qu´ moi, j´ prends leurs valises.
Et dans tous ceux-là qui s´en vont,
On n´en voit jamais un qui dise :
" Hé l´ porteur, peut-être qu´il trouv´rait ça bon
De monter avec nous dans l´ wagon. "
Alors, j´ reste Fredo l´ porteur.
L´aut´ jour, un taxi s´arrete.
Je m´ précipite, c´était mon tour.
Bon. J´ouvre la portière, je rentre la tête
Pour bien voir si y´ avait du lourd
Et puis, v´ là qu´ j´aperçois une fille,
Une fille qu´avait tellement d´ beauté
Que j´en étais paralysé.
Tout en tremblotant sur mes quilles,
Elle me dit avec un sourire :
" Tenez porteur, prenez tout ça. "
Et moi, comme un mannequin en cire,
J´ la r´gardais et puis j´bougeais pas.
J´avais envie d´ lui dire :
" Madame, depuis qu´il m´est permis d´ rêver,
Depuis que je connais le verbe aimer,
Dans le corps, dans le cœur et puis dans l´âme,
C´est toujours à vous qu´ j´ai pensé.
Sûrement que vous étiez l´inconnue,
Celle qu´on arrange à sa façon,
Qui n´ refuse rien, qui s´met toute nue
Et qu´a la peau comme une chanson
Dont chaque refrain dirait " je t´aime "
Et je suis là, devant vos yeux,
Vos grands yeux bleus, si grands, si sombres
Qui trouvent le moyen avec tant d´ombre
De rester autant lumineux,
Qu´il faut convenir qu´ dans le fond des cieux
La nuit a dû crever son voile
Pour que ses plus jolies étoiles
Dégringolent s´installer chez elle "
Mais la fille m´a interrompu : " Hein?
Alors l´ami, qu´est ce que vous faites?
Ça va pas bien, vous êtes perdu? "
J´ lui ai dis " non " en s´couant la tête.
" Bon, alors, " qu´elle a dit, " ça va.
N´attendez pas, prenez tout ça. "
J´ai empoigné les bagages,
Les sacs, les cartons à chapeaux.
J´ me suis tout filé sur le dos
Et suis parti dans son sillage,
Vers le wagon capitonné,
Où s´ que j´ l´ai doucement installée
Pour qu´elle soit bien pendant l´ voyage.
Quand elle m´a tendu du pognon,
Sûr´ment qu´elle n´a pas du comprendre
Pourquoi qu´ subitement j´ai dit " non "
Et qu´ je m´ suis dépêché de descendre.
De là, j´ suis parti au bistrot,
J´ai bu un coup, deux coups, trois coups,
J´ai bu jusqu´à temps que j´ sois saoul.
Puis j´ai expliqué aux poteaux
Les beaux yeux et les ch´veux de ma blonde.
Quand j´ai eu fini d´ raconter,
Si vous aviez vu à la ronde
Comment ils ont tous rigolé.
Moi, j´ai rigolé avec eux, hein.
Entre hommes, y fallait ça, c´était mieux.
Mais, c´ que ça m´ faisait mal de rire,
Surtout que j´ pouvais pas leur dire
Que d´un coups, je m´ sentais tout vieux
Parc´que moi, Fredo l´ porteur,
Je v´ nais de faire la plus grande bêtise
En ayant porté la valise
Qui pour toujours emm´nait mon cœur.