Quai numéro trois, c´est ici
Tu vas peu dormir cette nuit
Le vent fait rage
Prends des couvertures, des journaux
Enfin, chéri, tout ce qu´il faut
Pour le voyage
Encore un quart d´heure, mon amour
Un quart d´heure, c´est vraiment bien court
Pour ceux que le destin sépare
Comme il fait froid dans cette gare!

Ce manteau nouveau te grandit
Tu n´as rien oublié, je crois
En arrivant, écris, écris
C´est, vois-tu, ma seule exigence
Tu dis «C´est promis, j´écrirai
Et puis, voyons, je reviendrai
Ne sois pas triste»
C´est faux! Tu ne reviendras pas
Je le sais et malgré cela
Vois, je résiste
Encore cinq minutes, mon amour
C´est fou comme l´aiguille court
Au cadran de la grosse horloge
Que mes yeux, sans cesse, interrogent

Se peut-il qu´ils soient les derniers
Ces longs baisers que tu me donnes?
«En voiture!» vient-on de crier
Tu es monté, tu m´abandonnes
Ouvre la vitre, écoute-moi
Je n´ai vraiment aimé que toi
Et dans la ville, désormais, pour me soutenir
Je n´aurai que le souvenir
De ma folie

Le train va partir, mon amour!
Il part! Et sur le quai je cours
Adieu! Ne m´oublie pas trop vite
Je vois un mouchoir qu´on agite
Puis plus rien...
Mais quel est ce bruit
Là sur les rails où l´ombre règne?
Ce bruit singulier dans la nuit
C´est mon cœur écrasé qui saigne!