Robert le diable
par Jean Ferrat
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Tu portais dans ta voix comme un chant de Nerval
Quand tu parlais du sang jeune homme singulier
Scandant la cruauté de tes vers réguliers
Le rire des bouchers t´escortait dans les Halles
Tu avais en ces jours ces accents de gageure
Que j´entends retentir à travers les années
Poète de vingt ans d´avance assassiné
Et que vengeaient déjà le blasphème et l´injure
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Debout sous un porche avec un cornet de frites
Te voilà par mauvais temps près de Saint-Merry
Dévisageant le monde avec effronterie
De ton regard pareil à celui d´Amphitrite
Enorme et palpitant d´une pâle buée
Et le sol à ton pied comme au sein nu l´écume
Se couvre de mégots de crachats de légumes
Dans les pas de la pluie et des prostituées
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Et c´est encore toi sans fin qui te promènes
Berger des longs désirs et des songes brisés
Sous les arbres obscurs dans les Champs-Elysées
Jusqu´à l´épuisement de la nuit ton domaine
O la Gare de l´Est et le premier croissant
Le café noir qu´on prend près du percolateur
Les journaux frais les boulevards pleins de senteur
Les bouches du métro qui captent les passants
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
La ville un peu partout garde de ton passage
Une ombre de couleur à ses frontons salis
Et quand le jour se lève au Sacré-Cœur pâli
Quand sur le Panthéon comme un équarissage
Le crépuscule met ses lambeaux écorchés
Quand le vent hurle aux loups dessous le Pont-au-Change
Quand le soleil au Bois roule avec les oranges
Quand la lune s´assied de clocher en clocher
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Quand tu parlais du sang jeune homme singulier
Scandant la cruauté de tes vers réguliers
Le rire des bouchers t´escortait dans les Halles
Tu avais en ces jours ces accents de gageure
Que j´entends retentir à travers les années
Poète de vingt ans d´avance assassiné
Et que vengeaient déjà le blasphème et l´injure
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Debout sous un porche avec un cornet de frites
Te voilà par mauvais temps près de Saint-Merry
Dévisageant le monde avec effronterie
De ton regard pareil à celui d´Amphitrite
Enorme et palpitant d´une pâle buée
Et le sol à ton pied comme au sein nu l´écume
Se couvre de mégots de crachats de légumes
Dans les pas de la pluie et des prostituées
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Et c´est encore toi sans fin qui te promènes
Berger des longs désirs et des songes brisés
Sous les arbres obscurs dans les Champs-Elysées
Jusqu´à l´épuisement de la nuit ton domaine
O la Gare de l´Est et le premier croissant
Le café noir qu´on prend près du percolateur
Les journaux frais les boulevards pleins de senteur
Les bouches du métro qui captent les passants
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne
La ville un peu partout garde de ton passage
Une ombre de couleur à ses frontons salis
Et quand le jour se lève au Sacré-Cœur pâli
Quand sur le Panthéon comme un équarissage
Le crépuscule met ses lambeaux écorchés
Quand le vent hurle aux loups dessous le Pont-au-Change
Quand le soleil au Bois roule avec les oranges
Quand la lune s´assied de clocher en clocher
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne
Comme un soir en dormant tu nous en fis récit
Accomplir jusqu´au bout ta propre prophétie
Là-bas où le destin de notre siècle saigne