L'horloge de grand-mère
par Théodore Botrel
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C´est une horloge en châtaignier
Au long coffre à la mode antique
Que dut longuement travailler
Quelque Michel-Ange rustique
Au bas, le sonneur de biniou
Fait face au sonneur de bombarde,
Durant qu´au fronton, un hibou
De ses grands yeux ronds vous regarde
Oh! combien cela me charmait,
Quand j´étais tout petit, de suivre
La mort des heures que rythmait
L´énorme balancier de cuivre
Car vraiment, lorsque près d´un seuil,
On contemple une horloge close,
Elle a tout l´air d´un long cercueil
Où le temps, qui n´est plus, repose
La première heure que chanta
L´horloge de sa voix profonde
Fut celle où grand´maman jeta
Son premier cri dans ce bas-monde
Et ce fut ce Dong! éclatant
De demi-heure en demi-heure
Qui régla dès lors chaque instant
De ta vie, ô Toi que je pleure!
Dong! Dong! elle sonnait ainsi
Et l´heure grave et l´heure folle,
L´heure des jeux et l´heure aussi
Où partait l´enfant pour l´école
Dong! Dong! le moment du réveil
Puis l´heure où l´on se met à table
Dong! Dong! le moment du sommeil
Quand passe le jeteur de sable
Dong! Dong! l´heure où pour le Saint Lieu
On part en bande, le dimanche
L´heure où, pour recevoir son Dieu,
Plus tard, on met sa robe blanche
Dong! Dong! la prime-aube du jour
Où l´on va travailler la terre,
Et puis l´heure où gémit d´amour
Le cœur, las d´être solitaire!
Dong! Dong! les instants si joyeux
Où les petits gars apparaissent
L´heure digne où s´en vont les vieux
Pour faire place à ceux qui naissent
Et la femme en âge avançait,
Devenait maman, puis grand´mère
Et l´horloge aussi vieillissait
À tant sonner l´heure éphémère
Et grand´maman allait, venait
Chaque jour de plus en plus frêle
Et l´horloge sonnait, sonnait
D´une voix de plus en plus grêle
Quand de grand´maman la raison
Sembla pour toujours endormie,
L´horloge à travers la maison
Sonna l´heure pour la demie
Et grand´maman, dans son lit-clos,
Agonisa puis se tint coite
Et ce furent de longs sanglots
Que pleura l´horloge en sa boîte
Enfin, dans le lit, un soupir
Et le grand balancier de cuivre
S´arrêta d´aller et venir
Quand grand´maman cessa de vivre
Et grand´mère auprès des Élus
Est montée avec allégresse
Et l´horloge ne sonne plus,
Elle est morte aussi de vieillesse
Morte à jamais! C´est vainement
Qu´un grave horloger l´interroge,
C´était le cœur de grand´maman
Qui battait dans la vieille horloge!
Au long coffre à la mode antique
Que dut longuement travailler
Quelque Michel-Ange rustique
Au bas, le sonneur de biniou
Fait face au sonneur de bombarde,
Durant qu´au fronton, un hibou
De ses grands yeux ronds vous regarde
Oh! combien cela me charmait,
Quand j´étais tout petit, de suivre
La mort des heures que rythmait
L´énorme balancier de cuivre
Car vraiment, lorsque près d´un seuil,
On contemple une horloge close,
Elle a tout l´air d´un long cercueil
Où le temps, qui n´est plus, repose
La première heure que chanta
L´horloge de sa voix profonde
Fut celle où grand´maman jeta
Son premier cri dans ce bas-monde
Et ce fut ce Dong! éclatant
De demi-heure en demi-heure
Qui régla dès lors chaque instant
De ta vie, ô Toi que je pleure!
Dong! Dong! elle sonnait ainsi
Et l´heure grave et l´heure folle,
L´heure des jeux et l´heure aussi
Où partait l´enfant pour l´école
Dong! Dong! le moment du réveil
Puis l´heure où l´on se met à table
Dong! Dong! le moment du sommeil
Quand passe le jeteur de sable
Dong! Dong! l´heure où pour le Saint Lieu
On part en bande, le dimanche
L´heure où, pour recevoir son Dieu,
Plus tard, on met sa robe blanche
Dong! Dong! la prime-aube du jour
Où l´on va travailler la terre,
Et puis l´heure où gémit d´amour
Le cœur, las d´être solitaire!
Dong! Dong! les instants si joyeux
Où les petits gars apparaissent
L´heure digne où s´en vont les vieux
Pour faire place à ceux qui naissent
Et la femme en âge avançait,
Devenait maman, puis grand´mère
Et l´horloge aussi vieillissait
À tant sonner l´heure éphémère
Et grand´maman allait, venait
Chaque jour de plus en plus frêle
Et l´horloge sonnait, sonnait
D´une voix de plus en plus grêle
Quand de grand´maman la raison
Sembla pour toujours endormie,
L´horloge à travers la maison
Sonna l´heure pour la demie
Et grand´maman, dans son lit-clos,
Agonisa puis se tint coite
Et ce furent de longs sanglots
Que pleura l´horloge en sa boîte
Enfin, dans le lit, un soupir
Et le grand balancier de cuivre
S´arrêta d´aller et venir
Quand grand´maman cessa de vivre
Et grand´mère auprès des Élus
Est montée avec allégresse
Et l´horloge ne sonne plus,
Elle est morte aussi de vieillesse
Morte à jamais! C´est vainement
Qu´un grave horloger l´interroge,
C´était le cœur de grand´maman
Qui battait dans la vieille horloge!